Côte d’Ivoire : Henri Konan Bédié, rassembleur, appelle au "retour des exilés"

 


Officiellement investi samedi par son parti, l’ex-président Henri Konan Bédié a appelé à l’union de l’opposition ivoirienne lors d’un meeting à Yamoussoukro. Le "Sphinx de Daoukro" ambitionne de revenir au pouvoir, plus de vingt ans après avoir été renversé par un coup d’État, si possible avec l’aide de Laurent Gbagbo et de Guillaume Soro.

Rassembler l'opposition ivoirienne autour de sa candidature, tel semblait être l'ambition d'Henri Konan Bédié pour son investiture officielle par son parti, samedi 12 septembre. À cette occasion l'ex-président (1993-1999) et chef du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) s'est exprimé lors d'un meeting qui a rassemblé plusieurs dizaines de milliers de militants à Yamoussoukro, la ville natale de Félix Houphouët-Boigny – président de la république de 1960 à 1993, fondateur du PDCI… et mentor d'"HKB", qui revendique sa succession.

"J'invite toutes les formations politiques et les plateformes politiques, qui le désirent, à soutenir ma candidature à l'élection présidentielle du 31 Octobre 2020 (...). Je vais avec l'opposition remporter cette élection présidentielle", a déclaré à la tribune Henri Konan Bédié, 86 ans.

Le "Sphinx de Daoukro" a aussi formulé cette promesse en cas de succès au scrutin présidentiel : "Je m'engage dès mon accession à la magistrature suprême, à mettre en place un Gouvernement de large ouverture, fédérant toutes les formations politiques et les forces sociales qui le désirent et à prendre des mesures concrètes et immédiates pour le retour sans condition de tous les exilés, la libération des tous les prisonniers politiques civils et militaires de la crise post-électorale de 2010 jusqu'à nos jours".

Un message de rassemblement à destination, entre autres, de l'ex-président Laurent Gbagbo et de l'ex-chef rebelle et ancien Premier ministre, Guillaume Soro. Ces deux poids lourds de la politique ivoirienne sont tous deux exilés, respectivement en Belgique et en France. Et samedi, des délégations de leurs partis respectifs, le Front populaire ivoirien et Générations et peuples solidaires, étaient présentes dans l'assemblée.

Gbagbo et Soro radiés des listes, la candidature de Ouattara contestée

Laurent Gbagbo et Guillaume Soro ont vu, fin août, des proches déposer leurs candidatures respectives à l'élection présidentielle. Elles ont, cependant, peu de chance d'aboutir : l'un a été condamné pour l'affaire dite du "braquage de la BCEAO", l'autre pour "recel de détournement de deniers publics", ce qui leur a valu d'être radiés, le 22 août, des listes électorales par la commission électorale indépendante (CEI).

À 86 ans – âge qui lui vaut des critiques mais qu'il considère comme "un atout" pour la fonction présidentielle –, "HKB" ambitionne de prendre le dessus sur le président sortant, Alassane Ouattara, avec lequel il est en rupture politique depuis 2018. "Il veut sa revanche sur Ouattara, qu'il a soutenu [en 2010], mais qui n'a pas, selon lui, respecté son engagement de redonner le pouvoir au PDCI en 2020. Il ne veut pas rester dans l'Histoire comme celui qui a perdu le pouvoir du PDCI d'Houphouët", estimait en juillet 2020 un observateur de la vie politique ivoirienne.

Le fait qu'Alassane Ouattara brigue un troisième mandat consécutif – qui fait l'objet d'une contestation en justice – n'a fait qu'ajouter de la tension. "Un troisième mandat de Ouattara serait illégal [selon la Constitution ivoirienne]", affirmait Henri Konan Bédié dans un entretien donné en juillet à France 24.

Comme la précédente, la Constitution ivoirienne de 2016 limite à deux le nombre des mandats présidentiels. Mais les partisans d'Alassane Ouattara affirment que le changement de Constitution a remis le compteur à zéro. L'annonce de sa candidature a provoqué des manifestations qui ont dégénéré en violences ayant fait plusieurs morts en août.

Et à quelques semaines d'une présidentielle qui s'annonce sous haute tension, surgit le spectre d'un scénario similaire à la présidentielle de 2010. La crise post-électorale, où le président d'alors, Laurent Gbagbo, refusait de reconnaître sa défaite face à Alassane Ouattara, avait fait 3 000 morts.

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